Après l’établissement obligatoire d’un plan de formation annuel (pour les employeurs comptant au moins 20 travailleurs) et le droit de formation individuel pour chaque travailleur (en fonction de la taille de l’entreprise et des éventuelles dispositions sectorielles, jusqu’à 5 jours par an), chaque employeur privé sera bientôt soumis à une troisième obligation de formation : l’enregistrement de toutes les formations formelles et informelles dans le cadre de la relation de travail dans une base de données publique, le Compte d’apprentissage fédéral (Federal Learning Account, FLA).
Vous trouverez ici une discussion détaillée du projet de loi relatif au FLA. La loi a entre-temps été approuvée et publiée l’année dernière au Moniteur belge.
Même si elle entrera officiellement en vigueur le 1er avril 2024, l’obligation effective d’enregistrer les formations dans le FLA ne prendra effet que plus tard dans l’année. En effet, il reste encore de nombreux obstacles à surmonter pour rendre le FLA réalisable.
À l’heure actuelle, il est question d’un report de l’obligation d’enregistrement des formations au 30 novembre 2024. Toutes les organisations patronales signalent toutefois que même avec ce report, le projet est totalement irréalisable et fait subir inutilement des frais aux employeurs.
Phase pilote laborieuse
L’objectif du FLA est clair. Un enregistrement précis des crédits de formation légaux et sectoriels, des droits de formation et des formations proposées et suivies dans le cadre de la relation de travail devrait donner à chacun un bon aperçu de la situation de formation dans une entreprise et du développement professionnel de chaque travailleur. La culture d’apprentissage générale devrait en profiter. Il reste à savoir si l’enregistrement a effectivement cet effet.
Mais indépendamment de cela, la situation semble loin d’être idéale, puisque le FLA implique sans nul doute des formalités administratives supplémentaires considérables dans le chef des employeurs.
Enregistrer tous les efforts de formation – surtout les efforts informels (par exemple « training on the job », cours en ligne, auto-apprentissage...) – en interne et dans le FLA n’aura rien de simple.
L’enregistrement correct du crédit de formation annuel de chaque travailleur (les « 5 jours ») ne sera pas du tout évident non plus. Il s’agit ici du nombre de jours (ou d’heures) de formation auxquels le travailleur a droit pendant l’année en cours, qui varie en fonction :
du régime de travail du travailleur ;
de la période pendant laquelle le travailleur est en service pendant l’année ;
de la taille de l’entreprise ;
en combinaison avec d’éventuelles dispositions sectorielles, permettant de déroger au crédit de formation légal.
Bien que les autorités disposent en principe de toutes les données pour enregistrer correctement ce crédit dans le FLA, cela n’aura pas lieu cette année.
Une phase pilote limitée à quelques dizaines d’entreprises est extrêmement laborieuse : il manque des instructions claires, des questions et des ambiguïtés restent en partie sans réponse, le transfert de grands fichiers de données (par exemple à partir d’un Learning Management System) s’avère difficile...
Report à fin novembre 2024
En raison de ce qui précède, un démarrage sans encombre au 1er avril n’est pas réalisable. Le ministre Dermagne a communiqué que l’environnement d’encodage du FLA et le(s) manuel(s) nécessaire(s) seront certes « en ligne » le 1er avril, mais qu’un report supplémentaire est prévu.
L’outil existera d’abord en version bêta. La version officielle sera ensuite lancée à partir du 1er juin 2024. Suivra une période de 6 mois durant laquelle les employeurs devront enregistrer les données nécessaires pour les formations en 2024.
Concrètement, la date limite pour l’enregistrement et la vérification des données serait donc le 30 novembre 2024. Cependant, les organisations patronales estiment également cet objectif impossible et insistent sur un nouveau report. Pour eux, le projet doit être remis à zéro dans son intégralité.
Et maintenant ?
Pour l’instant, il faut attendre. Du côté des employeurs, le message semble clair : l’obligation administrative pour les employeurs qui va de pair avec le FLA est inexécutable. Sans préparation approfondie, le FLA est irréalisable. Le report accordé par le ministre Dermagne n’est pas une solution pour eux.
Nous ignorons pour l’instant si le gouvernement entendra ce signal. Affaire à suivre, donc...